Est-ce la fin de l’ère de l’engagement ?

Article fin de l'ère de l'engagement
2020 a-t-elle sonné le glas de l’engagement ? La question de l’engagement des collaborateurs se pose depuis des années en entreprise, qui constate une difficulté à les fidéliser et à les motiver. De nouvelles tendances, comme le big quit et le quiet quitting, trahissent ce malaise dans le monde du travail. La question est donc de savoir quelle place a, aujourd’hui, la notion d’engagement dans l’organisation. D’abord innovation phare de la pensée managériale du XXe siècle, elle est devenue un indispensable dans la structure des entreprises. L’objectif est de combler le manque de ressources internes, un dispositif qui aboutit à des organisations dites maltraitantes. Ces éléments posent la question de la création de nouveaux modèles

L’innovation phare de l’entreprise

Une notion clé mais récente dans l'histoire du management

On l’oublie souvent, mais l’engagement n’est pas une notion qui va de soi. Sa théorisation marque l’innovation phare du XXe siècle. La définition est cependant mouvante, on peut dans un premier dire que l’engagement désigne la loyauté associée à un sentiment d’attachement d’un individu envers son entreprise. L’engagement au travail représente aujourd’hui un enjeu majeur pour les entreprises. La motivation, quant à elle, englobe divers éléments personnels, économiques, sociaux, et environnementaux qui incitent les employés d’une entreprise à s’engager pleinement dans l’accomplissement de leurs tâches professionnelles assignées.

Plus largement, l’engagement requiert que le collaborateur déploie une forme de valeur ajoutée en dépassant les tâches de sa fiche de poste. Deux définitions différentes qui impliquent des exigences différentes, et qui sont bien à différencier de la notion de motivation. L’engagement est considéré comme un indicateur de performance de premier ordre. Les moyens de la mesurer se sont multipliés, tout comme les questions sur comment la raviver après des années difficiles. Si la notion est différente de la satisfaction au travail, elle peut en être un facteur important. Plus largement, l’engagement requiert que le collaborateur met en avant sa valeur ajoutée en dépassant les tâches de sa fiche de poste. Deux définitions différentes qui impliquent des exigences différentes, et qui sont bien à différencier de la notion de motivation.

Une chute de l’engagement mondiale qui traduit un mal-être généralisé

L’engagement est considéré comme un indicateur de performance de premier ordre. Les moyens de la mesurer se sont multipliés, tout comme les questions sur comment la raviver après des années difficiles. Si la notion est différente de la satisfaction au travail, elle peut en être un facteur important. Le manque d’engagement traduit donc une forme de mal-être dans son organisation.

La dernière étude de Gallup fait état d’un bilan un pneu plus positif que les années précédentes. Cependant, le nombre de collaborateurs se déclarant engagés dans l’entreprise est toujours très bas en Europe (13% en Europe). Plus de la moitié des salariés (59%) font du quiet quitting (non engagés) et 18% sont activement désengagés.

Comment expliquer que les collaborateurs ne se sentent plus alignés ?

L’engagement est devenu indispensable structurellement

D’après un article disponible sur Harvard Business Review France, les grandes entreprises ont besoin aujourd’hui de l’engagement de leurs employés pour mettre en œuvre leur stratégie organisationnelle. Tout comme la financiarisation a influencé leur style de gestion, elle a également modifié la raison d’être de l’organisation. Au XXIe siècle, la raison d’être d’une entreprise se résume davantage à “baisser le coût du collectif de travail”. Toute restructuration au sein d’un grand groupe exige inévitablement une réduction des coûts salariaux. Avec les transformations successives axées sur des priorités financières, l’efficacité de l’organisation diminue. Ainsi, l’engagement des employés devient essentiel pour compenser les lacunes structurelles.

Or l’engagement, contrairement à la motivation, est un acquis pour les entreprises. La question est donc de savoir : quand un collaborateur est-il assez engagé ? De nombreux mouvements ont vu le jour aux Etats-Unis, comme act your wage, pointant le fait que les nouvelles générations ne souhaitent plus s’engager au prix de leur santé et de leur temps libre.

Ce qui aboutit à des modèles d’entreprises maltraitantes

Cette configuration aboutit souvent à un déséquilibre entre les efforts fournis et les récompenses attendues par les collaborateurs. Il existe deux situations peu enviables lorsqu’on érige l’engagement des salariés comme une condition non négociable de réussite et performance.

Le surengagement : Certains salariés, par loyauté ou identification aux valeurs de la société, sont surinvestis. Le burn-out découle parfois d’un engagement excessif, un thème central en gestion, mais l’utilisation de certains outils peut devenir redoutablement efficace. Avant d’atteindre le burn-out, le surengagement du collaborateur peut avoir des répercussions graves sur sa santé et ses performances.
– La baisse drastique de l’engagement et de la motivation : La complexité organisationnelle aboutit à une perte de sens globale. Cela aboutit au quiet quitting, déjà mentionné précédemment. Le collaborateur ne trouve pas de sens à son travail et ne constate pas d’évolutions professionnelles possibles, ce qui peut mener au bore-out.

Ces deux éléments se traduisent par une hausse des risques psychosociaux

La fin de l’engagement : vers de nouveaux modèles et enjeux ?

Mieux cerner les nouveaux besoins des collaborateurs

Beaucoup d’entreprises ont tendance à mesurer l’engagement, mais les indicateurs de désengagement sont tout aussi centraux. Les départements des Ressources Humaines devraient se concentrer sur la nécessité de faire face au désengagement, mesurable à travers l’absentéisme et le taux de rotation du personnel. Ce changement de perspective est crucial dans les stratégies RH qui en résultent. En effet, l’arrivée de nouvelles générations et d’une plus grande flexibilité des modalités de travail changent la donne. L’expérience collaborateur devient essentielle, en particulier dans un monde du travail qui nécessite beaucoup de réactivité. Les modèles organisationnels doivent être repensés pour favoriser le feedback continu et l’évolution professionnelle.

Mieux cerner les nouveaux besoins des collaborateurs

Pour ce faire, l’entreprise doit reprendre le contrôle de son organisation et de ne plus la déléguer. Les organisations reposent beaucoup sur des outils standardisés, des bonnes pratiques et des comparaisons permettant de définir des effectifs cibles. Autant d’éléments qui ne garantissent l’adaptabilité nécessaire pour créer une entreprise qui fonctionne sainement au quotidien. Ente bureaucratisation et financiarisation, le collaborateur est souvent perdu dans des process qui l’éloignent du sens, de la mission de l’entreprise et du produit final. L’entreprise doit donc trouver comment remettre au cœur de sa réflexion l’humain au-delà des principes de management qui n’ont, d’après l’essai La faillite de la pensée managériale de François Dupuy, cessé de s’appauvrir.

Comme Daniel Cohen l’avait rappelé en début d’année, la question de la fin de l’engagement pose celle d’un nouveau cycle économique et de la création de nouveaux modèles à organiser. Et les DRH sont plus que jamais appelées à s’affirmer comme les actrices de ce changement.

Camille Barbry
Camille Barbry
Gestionnaire de contenu
Camille Barbry crée du contenu depuis plus de 4 ans. Spécialisée en Ressources Humaines. Elle a coécrit un livre, “RH et transformations, Stratégies et tactiques pour s’adapter dans un monde incertain”, paru en mai 2022 aux éditions Dunod. Depuis 2022, elle travaille au Cercle Humania comme gestionnaire de contenu.