Le mardi 20 mai 2025
Invité
Agnès Verdier-Molinié, Directrice de la fondation iFRAP.
Quelques mots sur l'événement
Quelques jours après avoir interrogé Emmanuel Macron sur les plateaux de TF1 et face à plus de cent DRH réunis dans les salons de l’Hôtel des Arts et Métiers, Agnès Verdier-Molinié a tiré la sonnette d’alarme sur le budget le 20 mai dernier, tout en fournissant un flot de chiffres pour prouver à l’auditoire que l’on peut freiner sur les dépenses, plutôt que de taxer davantage les entreprises.
« La dette est un sujet de souveraineté »
Pour Agnès Verdier-Molinié, la dépense publique française est devenue une urgence nationale. « La dette est un sujet de souveraineté, on a besoin de 300 milliards par an pour faire tourner la maison France. » Elle a mené une charge véhémente contre le modèle social, rappelant que « nos entreprises françaises paient 157 milliards de plus de prélèvements obligatoires que le reste de la zone Euro. »
« Et ces 157 milliards, a-t-elle précisé, seraient toujours 130 si l’on n’avait pas d’allégements comme le CIR. Ces dispositifs ne sont pas des cadeaux, mais une question de survie ! En France, nous avons 40 milliards de charges supplémentaires sur le travail. »
D’après la directrice de l’IFRAP, « on a perdu l’idée que pour financer notre modèle social, il faut travailler et croître. Sinon, il n’y a pas de financement de l’État, ni des collectivités ni de la Sécurité sociale. Or, les entrepreneurs, si vous les taxez davantage, ils ne vont pas rester en France. Le plus important, c’est de rassurer ceux qui créent la richesse… On remplit les caisses publiques en créant de la confiance, pas de la défiance. »
Pour « convaincre les investisseurs et montrer qu’on est capable de juguler la dette », il faut reprendre le contrôle du budget. Et vite : « La Commission européenne vient de publier ses chiffres : ils montrent que la France est toujours lanterne rouge, et le restera en 2026 et 2027. »
Des poches d’économie dans le secteur public
Comment trouver 40 milliards d’économies dès 2026 ? Pour Agnès Verdier-Molinié, l’une des solutions passe par les collectivités locales (régions, départements, intercommunalités et grandes communes). « Si l’on fait converger tout le monde à la moyenne des dépenses de fonctionnement par habitant, c’est 8 milliards d’économies par an. Et si on s’aligne sur les 10 % des collectivités les moins dépensières, c’est 30 milliards ! Il existe clairement des marges de manœuvre. » Elle a rappelé le bien-fondé des pactes de Cahors d’Édouard Philippe : « ils ont freiné les dépenses des collectivités territoriales, mais ont hélas disparu pendant la période Covid, pour ne jamais réapparaître. »
Or, « si l’État s’est serré la ceinture, les dépenses ont toujours des points de fuite sur le social et sur le local. Est-ce qu’on veut entrer dans la boîte noire de la dépense publique ? Cela fait des années qu’on en parle et des rapports ont été publiés sous tous les présidents récents. Mais cela n’avance guère. J’ai été auditionnée la semaine dernière par la Commission d’enquête sur les opérateurs de l’État et les agences. Il n’existe pas de liste globale de dépenses de ces entités : j’ai estimé avec mon équipe qu’elles se portent à 155 milliards d’euros annuels. Sans obligation de publier leurs comptes. »
Oui, il va falloir travailler plus longtemps
Reculer l’âge de la retraite et cumuler emploi-retraite : Agnès Verdier-Molinié défend vigoureusement ces deux dispositifs. Elle s’est même prononcée en faveur d’un référendum : « Ne sous-estimons pas les Français. La bonne trajectoire commence par leur dire la vérité. Les Suisses, avec leurs votations, ont décidé du frein à l’endettement ou encore de la suppression du statut de la fonction publique. Ils ont voté pour 100% de baisses de dépenses et 0% de hausse d’impôts (et non pas pour 50-50 ni pour 0-100). Demandons aux Français s’ils préfèrent un report de l’âge de la retraite ou une hausse des impôts et cotisations : ils voteront comme un seul homme. »
Pour aller plus loin !
Le dernier livre d’Agnès Verdier-Molinié s’appelle « Face au mur », avec cinq mots en sous-titre : dette, désindustrialisation, normes, assistanat, insécurité. Si cette approche vous intéresse, il est paru aux Éditions de l’Observatoire en février dernier. « Cela fait 50 ans qu’on est en déficit, cela valait bien 50 propositions de solutions. »
À noter dans vos agendas : nous vous donnons rendez-vous le 2 juillet prochain pour un nouveau dîner-débat en présence du Général Marc Boget, Directeur de la stratégie digitale et technologique de la Gendarmerie nationale.