La data et la DRH, entre potentiels et freins

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Image data et rh - enjeux et potentiels

Dès 2019, Josh Bersin affirmait que “maîtriser les data pour les RH n’était plus – juste – une valeur additionnelle, mais une obligation”. Si cette citation est partagée par tous sur le papier, il est encore difficile pour la DRH de parvenir à mettre en place un système cohérent de gestion de la donnée.

En effet, d’après le baromètre Future of HR de Deloitte, Les Directeurs des Ressources Humaines (DRH) des grandes et moyennes entreprises françaises affirment que la crise du COVID-19 a entraîné une accélération forcée de la digitalisation de leurs processus RH, en particulier pour ce qui concerne la gestion des talents et les nouveaux modes de travail. Bien qu’ils soient conscients des avantages d’une transformation numérique de leurs processus, les chantiers les plus importants restent à mener : 94% des entreprises interrogées estiment ne pas avoir achevé leur transformation.

Trois grands freins rendent l’adoption de la data RH complexe

Un manque d’acculturation autour de la data RH

Les professionnels des Ressources Humaines s’occupent des talents sans toujours privilégier les aspects chiffrés. Les DRH ont tendance à être formés au droit social et en gestion. Deux parcours qui n’incluent que peu de formations liées à l’analyse des données et aux compétences digitales au global. Bien que la collecte de données puisse être perçue comme une tâche contraignante, elle est en réalité une source de valeur ajoutée. Il est donc crucial de prendre le temps d’expliquer les enjeux, l’utilité et la signification de cette collecte de données, ainsi que son rôle dans la contribution au chiffre d’affaires et à la marge bénéficiaire de l’entreprise.

Une meilleure compréhension de ces liens renforcerait la volonté et la capacité des RH quant à la collecte, l’exploitation et l’analyse de ces données, permettant de faire progresser les talents à la fois individuellement et collectivement. Il est donc primordial de diffuser cette compréhension et de la faire proliférer pour maximiser l’impact des données RH.

Un cloisonnement entre les différents outils de la SIRH

Les données relatives aux ressources humaines sont souvent emprisonnées dans différents systèmes qui ne communiquent pas entre eux (comme les outils de recrutement ou de formation). Il convient de souligner que dans les grandes entreprises décentralisées, ces systèmes peuvent être particulièrement nombreux et cloisonnés. Cela participe grandement à un manque de qualité et de cohésion de la data.

Il est donc crucial de travailler en étroite collaboration avec la Direction des Systèmes d’Information (DSI) afin de centraliser les systèmes de collecte de données RH, au-delà des processus. Mais cela peut créer des défis en termes de Gouvernance entre deux départements. En revanche, une relation bien équilibrée entre ces deux parties permettra d’établir une source unique et fiable pour les indicateurs clés de performance RH, allant du recrutement (taux de conversion des candidats en employés) à la rémunération (équité salariale entre hommes et femmes). De plus, cette unification des systèmes de données RH permettra d’aller plus loin dans les analyses transversales, en étudiant par exemple des groupes de population spécifiques (tels que les jeunes, les femmes ou les départs regrettés).

Des process de sécurité de la donnée contraignants

De la candidature en ligne au bilan de compétences, en passant par les tests de dépistage et les informations bancaires, toutes les activités liées aux ressources humaines nécessitent la collecte de données personnelles, parfois sensibles, des salariés de l’entreprise.

Ainsi, les directions des ressources humaines sont directement concernées par le Règlement Général sur la Protection des Données. Il est important de rappeler que le RGPD vise notamment à renforcer quatre principes clés : le consentement, la transparence, les droits des personnes et la responsabilité. C’est donc un texte de grande complexité qui implique des processus stricts dans la gestion des bases de données : où les données sont-elles stockées ? Comment sont-elles sécurisées ? Tous les opt-in et opt-out sont-ils correctement paramétrés ? Autant de règles et de questions qui nécessitent une véritable expertise aussi bien légale que technique, souvent absente ou peu développée dans les départements RH.

Les possibilités sous-utilisées de la data RH

Mieux identifier les biais et les croyances

Les open spaces se sont multipliés sur la base d’une idée simple : les bureaux ouverts permettent de favoriser la communication et la collaboration.

Or, La technologie actuelle permet de collecter des données sur les interactions et les déplacements réels des employés au sein des bureaux. Dans un article de la Harvard Business Review, il est ainsi expliqué comment les modifications apportées aux espaces de travail ont un impact direct sur la qualité du travail des collaborateurs. Par exemple, les entreprises ayant opté pour un open space afin de favoriser les échanges directs ont constaté une diminution de 70% de ces échanges.

Il est donc clair que, dans le domaine des Ressources Humaines, une culture et une compréhension de la donnée permettent de proposer des solutions plus adaptées aux besoins des organisations et des collaborateurs, dans une démarche d’optimisation continue.

Améliorer l’expérience des collaborateurs

La donnée permet de développer des stratégies vertueuses pour l’expérience collaborateurs. Cela peut être très pratique. Par exemple, certaines entreprises ont mis en place des trackers sous les bureaux qui permettent de repérer quels bureaux sont déjà occupés. Cela évite à des collaborateurs d’effectuer des parcours trop longs pour trouver sièges et salles de réunion inoccupées.

La donnée est également, bien sûr, le support d’outils SIRH. De nombreuses solutions sont développées pour améliorer l’expérience collaborateur. C’est le cas de plateformes favorisant la mobilité interne en se basant sur les données comme les souhaits et les compétences des collaborateurs, facilitant la formation professionnelle… La donnée offre des possibilités multiples pour émuler l’expérience collaborateur.

Mettre en avant l’expertise du département RH

Les contraintes et réglementations liées aux entreprises sont multiples : index d’égalité Femmes-Hommes, OQTH, emploi des séniors… La gestion de la diversité devient un critère central en termes d’ESG et de respect de la loi. Or, ces éléments nécessitent de bien connaître les données existantes en termes de population pour être capable de fournir un reporting adéquat et mener en conséquence les actions.

Au-delà, ces éléments permettent de consolider l’image de marque employeur et de favoriser le bien être des collaborateurs. Les directions RH peuvent utiliser la data pour soutenir leur action et prouver le bien-fondé des stratégies, favoriser le recrutement et devenir des business partners à part entière au sein des organisations.

Détecter les compétences insoupçonnées

Les données permettent de mieux comprendre les compétences existantes au sein de l’entreprise et d’identifier les lacunes à combler. En recueillant des informations sur les compétences de chaque employé, les employeurs peuvent mieux comprendre les talents de leur personnel et les utiliser de manière plus efficace. Les données peuvent également aider les employeurs à évaluer les besoins en formation de leurs employés et à planifier des programmes de développement de compétences pour améliorer leur performance. C’est une démarche centrale dans la mise en place d’une organisation centrée sur les compétences plutôt que sur les jobs.

Au-delà, ces éléments permettent de consolider l’image de marque employeur et de favoriser le bien être des collaborateurs. Les directions RH peuvent utiliser la data pour soutenir leur action et prouver le bien-fondé des stratégies, favoriser le recrutement et devenir des business partners à part entière au sein des organisations.

Détecter les compétences insoupçonnées

Selon une définition datant de 1975 et donnée par Igor Ansoff, économiste, un signal faible est « une information d’alerte précoce, de faible intensité, pouvant être annonciatrice d’une tendance ou d’un événement important ». La prolifération des données s’accompagne d’une capacité accrue d’analyse. L’explosion des capacités de stockage et de traitement de l’information a considérablement modifié notre capacité à traiter les données, et l’intelligence artificielle nous permet de voir ce qui échappe à l’œil humain et de déceler des pistes que nous n’aurions pas pu comprendre seuls.

Les objectifs ont également évolué. Il ne s’agit plus de fournir à la direction de l’entreprise des tableaux de bord démontrant la capacité de la RH à recruter, fidéliser et piloter la masse salariale. Il est désormais primordial de donner du sens aux données, de savoir rapprocher les indicateurs business et RH, et de confronter les données quantitatives aux données qualitatives.

En d’autres termes, il est nécessaire de savoir capter les signaux faibles au niveau le plus fin de l’entreprise afin de pouvoir agir de manière locale et ciblée. La fonction RH connaît ainsi la même révolution que celle qu’a connue le marketing. On passe d’un traitement de masse à une individualisation de l’action. On ne réalise plus de grandes opérations RH pilotées en central, mais on fournit au management de proximité les indicateurs et les outils leur permettant de répondre aux besoins précis de leurs équipes. Dès lors, les actions RH peuvent être ciblées et plus efficaces.

Au-delà, ces éléments permettent de consolider l’image de marque employeur et de favoriser le bien être des collaborateurs. Les directions RH peuvent utiliser la data pour soutenir leur action et prouver le bien-fondé des stratégies, favoriser le recrutement et devenir des business partners à part entière au sein des organisations.

Les possibilités sous-utilisées de la data RH

Bien que la collecte et l’analyse des données RH soient de plus en plus essentielles pour les entreprises, il reste encore des défis importants à relever. Les professionnels des ressources humaines ont besoin :

  • d’une meilleure compréhension des enjeux liés à la data,
  • d’une collaboration plus étroite avec les services informatiques,
  • d’un respect strict des règles de sécurité des données
  • de la mise en place d’analyses plus approfondies pour mieux comprendre les biais et les croyances en jeu.
  • d’un accompagnement dans la structuration de la data
  • d’une simplification des interfaces de pilotage de la data (collecte, analyse, partage d’information…) afin d’en faire de véritables outils métier que chacun peut s’approprier

In fine, la maîtrise de la data RH permettra aux entreprises de prendre des décisions plus éclairées et de mieux gérer leur capital humain, offrant un avantage concurrentiel significatif sur le marché et de mettre en avant leur expertise comme business partner.

Camille Barbry
Camille Barbry
Gestionnaire de contenu
Camille Barbry crée du contenu depuis plus de 4 ans. Spécialisée en Ressources Humaines. Elle a coécrit un livre, “RH et transformations, Stratégies et tactiques pour s’adapter dans un monde incertain”, paru en mai 2022 aux éditions Dunod. Depuis 2022, elle travaille au Cercle Humania comme gestionnaire de contenu.